Private equity : tech et santé, des secteurs en pleine mutation

Table ronde tech et santé, PEX 2025
03 Déc 2025

 

La tech et la santé s’imposent comme des axes stratégiques majeurs pour les investisseurs du private equity. À l’occasion de l’édition 2025 du Private Equity Exchange (PEX), dont Valtus était partenaire pour la 3e année consécutive, Emmanuel Fretti, Senior Partner, participait à une table ronde consacrée aux perspectives de ces deux secteurs porteurs.

 

Un marché healthcare et MedTech en croissance exponentielle

Le secteur de la santé connaît une dynamique sans précédent, alimentée par la convergence de plusieurs facteurs structurels : le vieillissement démographique, les contraintes budgétaires imposées par les gouvernements qui exigent une efficience accrue, et une maturité technologique permettant de déployer un éventail élargi de services innovants.

Pour Emmanuel Fretti, les chiffres parlent d’eux-mêmes : « Plusieurs analyses estiment que le marché HealthTech/MedTech mondial dépasse déjà les 500 Md$ et pourrait approcher, voire dépasser, le milliard de milliards (1 000 Md$) à horizon 2030, selon les scénarios de croissance retenus. »

Cette croissance remarquable se traduit concrètement : certaines sociétés créées il y a seulement 5 à 7 ans génèrent déjà 13 millions d’euros de chiffre d’affaires, avec un EBITDA d’environ 6 millions.

Le secteur du diagnostic, longtemps considéré comme le parent pauvre de la santé, connaît un essor particulièrement fort. La digitalisation ouvre la voie à l’analyse de volumes massifs de données et à l’obtention de biomarqueurs numériques, transformant radicalement les possibilités diagnostiques.

 

Des fondamentaux solides malgré les turbulences

L’inflation des taux d’intérêts en 2022-2023 a ralenti le marché MedTech, conduisant certaines sociétés à se restructurer. Toutefois, elles reviennent aujourd’hui plus fortes et plus saines. Les fondamentaux demeurent très solides, mais seules les meilleures entreprises survivent.

Pour évaluer la solidité des acteurs du secteur, deux critères s’avèrent déterminants : la maturité digitale et l’implémentation des innovations technologiques, notamment l’intelligence artificielle, d’une part ; l’efficacité des processus et la capacité d’industrialisation, d’autre part.

 

L’hospitalisation à domicile : un levier d’optimisation majeur

« Une transition fondamentale s’opère actuellement : le passage des soins en centre hospitalier vers les soins à domicile », observe Emmanuel Fretti. Cette évolution répond à un impératif économique simple : l’hôpital représente le premier poste de dépenses dans les budgets santé, et l’hospitalisation à domicile (HAD) constitue un levier d’optimisation des coûts considérable.

De nombreux soins effectués à l’hôpital peuvent en réalité être réalisés à domicile, à condition de mettre en place les équipements, le monitoring adéquat et le personnel nécessaire. Au-delà de la réduction des coûts, l’HAD contribue également à répondre partiellement à la pénurie de professionnels de santé et améliore significativement la qualité de vie des patients.

Comme l’illustre Emmanuel Fretti :
« Le secteur de la santé évolue de réactif et centralisé sur l’hôpital vers proactif et centré sur l’hospitalisation à domicile. Cette transformation donne lieu à de nombreuses opportunités pour les entreprises. »

Cette évolution se reflète parfaitement dans l’expérience de Valtus. Lors d’une mission auprès de la direction générale d’une grande entreprise de dialyse, les équipes ont constaté que l’enjeu ne se limite pas à organiser les dialyses à domicile. Il s’agit également de mettre en place un écosystème complet de services additionnels de monitoring. Cette approche ouvre des opportunités majeures en matière de logiciels et de traitement de données.

 

La digitalisation, moteur de création de valeur

La digitalisation transforme en profondeur le secteur de la santé et permet la création de nouvelles sociétés à forte croissance.

  • Logiciels dédiés aux hôpitaux et professionnels de santé : ces solutions génèrent des revenus récurrents, affichent une croissance soutenue et conquièrent régulièrement de nouveaux clients.
  • Nouveaux acteurs spécialisés : des entreprises innovantes se positionnent sur des niches pointues, comme la cardiotoxicité à distance avec analyse des données d’essais cliniques.
  • Digitalisation de la R&D : jumeaux numériques, organ chips… La recherche et développement des grandes entreprises pharmaceutiques et des biotechs se digitalise rapidement.
  • Radiologie, biologie et médecine générale : en biologie, le sujet de la data prend une dimension exponentielle. L’intelligence artificielle peut également jouer un rôle préventif en identifiant des patients à qui proposer des tests de dépistage, en fonction de certains marqueurs biologiques.
  • Transformation digitale d’entreprises traditionnelles : cliniques vétérinaires, maisons de retraite et autres structures peu automatisées entament leur révolution numérique.

 

De nouveaux besoins en compétences

La transformation profonde du secteur de la santé fait évoluer les besoins en ressources humaines. « Pour évoluer de paper based à data based, il faut davantage d’experts en IT et en data. Si les professionnels de santé restent essentiels, de nouvelles technologies font apparaître de nouveaux profils. Ainsi, dans le secteur de la santé, les besoins RH évoluent », explique Emmanuel Fretti.

Les contraintes réglementaires renforcent également cette dynamique. L’implémentation du MDR (Medical Device Regulation) en remplacement du marquage CE constitue un défi majeur, en particulier en Europe. Pour contourner certaines de ces contraintes, certaines entreprises choisissent de démarrer leurs opérations de private equity aux États-Unis, où le cadre réglementaire est plus souple. Selon Emmanuel Fretti : « On voit ainsi des entreprises croître avec 70 à 90 % de leur chiffre d’affaires généré depuis les États-Unis. »

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Opportunités d’investissement à long terme

Les investisseurs recherchent des secteurs offrant des opportunités de croissance à long terme, avec des entreprises réalisant 30 à 50 millions de chiffre d’affaires et ayant le potentiel d’évoluer vers des structures beaucoup plus grandes.

Le secteur de la santé offre de la récurrence, mais les prix tendent à stagner. Il s’agit donc d’être particulièrement attentif aux frais fixes et à l’efficacité opérationnelle pour maintenir les marges.

Tech et santé demeurent deux secteurs particulièrement attractifs pour les investisseurs du private equity, portés par des transformations structurelles et technologiques profondes. La capacité à identifier les entreprises les plus solides, à accompagner leur digitalisation et à naviguer dans un environnement réglementaire complexe constitue la clé du succès dans ces secteurs en pleine mutation.

 

Intervenants de la table ronde

  • Mounia Chaoui, Managing Partner, Turenne Santé (Turenne Groupe)
  • Emmanuel Fretti, Senior Partner, Valtus
  • Charles Nantois, Managing Partner, Columna Capital
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