« VALTUS REDONNE DE LA VALEUR AUX CHEVEUX BLANCS »

Philippe Soullier
11 Mai 2023

Dans une interview pour Le Figaro, Philippe Soullier souligne la valeur que des cadres expérimentés peuvent apporter aux entreprises.

Valtus, cabinet de management de transition, fondé en 2001 par Philippe Soullier, est désormais actif dans six pays. Il emploie 120 personnes et compte 37 associés pour un chiffre d’affaires de 110 millions d’euros en 2022.

LE FIGARO. – Qu’est-ce qui vous a orienté, il y a un peu plus de vingt ans, vers le management de transition ?

Philippe SOULLIER. – Jeune cadre, j’étais impressionné par ces managers de quinze ou vingt ans de plus que moi. Je mesurais leur potentiel et je me disais qu’ils avaient toutes les capacités pour aider les entreprises à évoluer. Valtus est un centre d’expertise au service de ces transformations. Bien comprendre ce que veulent les entreprises, dans un monde en mutation, à la fois complexe, volatil et incertain, c’est notre métier. Nous mobilisons en quelques jours les meilleurs talents pour s’acquitter d’une mission sensible : une cession, le redressement d’une activité, un recentrage, la reconversion d’une usine…

Une mission qui est plus que du conseil ?

Nous sommes une entreprise au service d’autres entreprises. Nos associés sont des dirigeants hyper opérationnels, autonomes, mus par un triple objectif : comprendre les enjeux de l’entreprise qui leur fait face, sélectionner les talents pour y répondre, s’assurer que la mission donne les résultats escomptés. Il ne s’agit pas d’un travail à court terme : le manager de transition n’est peut-être là que pour neuf mois où un an, mais son action engage l’entreprise pour plusieurs années. Nos associés restent ensuite en contact pour veiller à la bonne trajectoire.

Qui sont-ils, ces managers de transition que vous envoyez chez vos clients ?

Des cadres expérimentés, de 50 ans de moyenne d’âge. Les moins de 40 ans sont rares. Le management de transition redonne de la valeur aux cheveux blancs, qui n’ont pas vraiment la cote dans les entreprises. Quelle erreur fondamentale ! Il arrive que nos managers endossent le rôle de mentor pour des cadres plus jeunes qui manquent encore un peu de bouteille pour prétendre occuper des postes de direction.

Et les femmes ?

Nous travaillons pour qu’elles occupent une place plus importante mais, à ces postes de haut niveau qui sont le cœur de notre activité, nous sommes freinés par un obstacle démographique. Les dirigeantes étant moins nombreuses que les dirigeants, cela limite notre vivier de femmes managers. Néanmoins, alors que l’on recense 1% de femmes dirigeantes en France, nous en comptons 25 parmi nos managers de transition. Je constate qu’il y a un leadership féminin, en particulier une sensibilité pour rassurer les équipes.

Deux fonds d’investissement sont actionnaires de Valtus aux côtés des associés. Quelles relations entretenez-vous avec ces financiers ?

Vous oubliez les salariés : nous avons développé très tôt l’actionnariat salarié, pour intéresser au maximum nos collaborateurs aux résultats de l’entreprise. La présence de fonds d’investissement permet d’ailleurs de donner une valeur à la participation des salariés. À l’origine, ce sont les fonds qui sont venus nous trouver. Ils étaient intéressés par notre démarche. Nous avions cinq demandes, nous avons finalement accueilli Société générale Capital Partenaires et Geneo Capital Entrepreneur. Ils remplissent quatre critères : ils portent un nom connu, synonyme de visibilité pour nous; ils peuvent nous apporter du business grâce à leur réseau; nous bénéficions de leur expertise en matière de fusions-acquisitions; enfin, ils ont un regard avisé sur les performances de Valtus. Ces quatre sources d’échanges sont d’une aide précieuse dans le cadre de notre développement international qui est notre priorité.

Vous-même, chez Valtus, avez-vous eu recours à des managers de transition ?

Bien sûr. Que ce soit pour les RH, le système d’information ou la finance, nous avons été épaulés par des managers de transition. Ils nous ont aidés à franchir des caps. Car nous avons un énorme besoin d’agilité : tous les ans, Valtus croit de 15% à 20%. En 2022, cette progression a atteint 47%. Dans notre cas, grâce à des managers de transition, nous avons pu structurer certaines fonctions qui sont aujourd’hui occupées par des cadres pérennes.

Ne craignez-vous pas, en procédant ainsi, de décourager vos équipes en les empêchant de progresser ?

Pas du tout. Se priver de managers de transition signifierait que nous fonctionnons en circuit fermé. Ils apportent au contraire de la respiration, complètent nos compétences et ouvrent sur de nouveaux horizons. La promotion interne n’est entravée en rien. Je pense à ce jeune qui est arrivé chez nous à l’accueil. Il est devenu assistant d’un associé. Ce rôle d’assistant est capital chez Valtus : il facilite la relation entre les clients et les associés.

Quel est l’impact de cette croissance sur l’organisation de Valtus ?

Avec 150 salariés à la fin de l’année, nous n’aurons plus assez de place. Nous réfléchissons à la bonne manière d’en gagner sans déménager. Actuellement, chacun a son bureau, sauf moi : depuis quelque temps, je teste le flex office. Entre les journées de télétravail, les RTT et les congés, je trouve toujours une place pour la journée. J’essaie de mesurer les avantages et les inconvénients de cette formule. En attendant, comme je n’ai pas de casier où les ranger, j’ai tendance à semer mes affaires dans l’entreprise !

Feriez-vous un bon manager de transition ?

Je suis conscient à la fois de mes compétences et de mes limites. Je me sens bien plus à ma place comme entrepreneur pour écrire l’histoire de Valtus sur le temps long.

> Retrouvez l’interview sur le site Le Figaro

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