Emploi des seniors : 45 ans, l’âge où tout recommence !

Yves Mégret, Managing Partner France - Valtus
05 Avr 2024
Par Yves Mégret, Managing Partner France

 

Article d’opinion paru dans La Tribune

 

Il est légitime de parler d’une puissante onde de choc pour les cadres. La réforme de la retraite à 64 ans va redessiner progressivement leur carrière. Pendant longtemps, le cap des 45 ans était un tournant puisqu’ils entraient dans la catégorie des seniors. Les belles années étaient derrière eux. La retraite se profilait dans un horizon pas si lointain, puisqu’ils étaient éligibles à certains dispositifs publics de maintien dans l’emploi.

 

La vulnérabilité des 45-54 ans, une réalité française à repenser

Mauvais présage ! C’était l’époque où le chômage frappait plus de 3 millions de Français. Le partage du travail était à la mode et les cadres les plus âgés étaient sommés d’écourter leur carrière pour « laisser la place aux jeunes ». C’était presque une question de civisme. 45-59 ans était bien la classe d’âge de tous les dangers. Un récent sondage IFOP pour le Club Landoy montre bien que cette période reste encore critique dans la vie d’un cadre : si trois actifs sur quatre sont satisfaits de leur situation professionnelle tout âge confondu, les 45-54 ans sont nettement plus réservés. Et c’est bien cette classe d’âge qui manifeste le plus de crainte pour son emploi. Une fois atteint les 60 ans, l’inquiétude recule.

Cette vulnérabilité des 45-54 ans est la conséquence d’un choix très français d’inciter les plus proches de la retraite à envisager de cesser leur activité à un horizon anticipé. Tout le monde y trouvait son compte : les entreprises qui cherchaient à se séparer des seniors pour réduire leurs effectifs et/ou leur masse salariale ; les salariés eux-mêmes qui voyaient là une aubaine pour partir plus tôt en retraite ; et les pouvoirs publics qui parvenaient ainsi à faire maigrir les statistiques grâce à des dispositifs toujours plus avantageux, pour faire la jonction entre le chômage et la cessation d’activité.

La réforme de l’assurance-chômage défendue par Emmanuel Macron et Gabriel Attal vise à casser cette logique et à réduire les durées d’indemnisation jugées trop favorables. Elle se situe dans la continuité du vote de la retraite à 64 ans et répond aux mêmes préoccupations. Alors que les talents se font plus rares dans tous les compartiments de l’économie, le travail des seniors est non seulement une nécessité financière pour réduire les déficits, mais une obligation économique pour atteindre le plein-emploi.

L’objectif est de redescendre à 5% de chômage alors que nous sommes encore à 7,4% de la population active selon l’Insee. On n’a jamais eu autant besoin de ces seniors qui restent dans la force de l’âge. Le maintien dans l’emploi jusqu’à 64 ans modifie assez radicalement la vision qu’ils peuvent avoir du déroulement de leur parcours professionnel. Les entreprises comme les pouvoirs publics doivent eux aussi modifier leur logiciel et adopter une posture plus inclusive. La transformation de Pôle emploi en France Travail doit y contribuer.

 

Valoriser le travail des seniors et encourager le rebond

C’est une bonne nouvelle pour les cadres : avoir 45 ans ne doit plus être considéré comme le début de la fin de sa carrière. Bien au contraire. Ça n’est pas le temps du rebut, mais plutôt le moment du rebond. Aujourd’hui, seuls 36% des plus de 60 ans continuent à travailler. L’objectif du gouvernement est de remonter à 65% et plus. L’ambition affichée par la nouvelle ministre du travail Catherine Vautrin est même de parvenir « au plein-emploi jusqu’à 64 ans ». Acceptons-en l’augure ! Mais il ne faut pas se le cacher. C’est une révolution des mentalités qu’il faut opérer. La perception des seniors au travail doit devenir positive. Cette remontada ne sera possible qu’en utilisant des outils spécifiques destinés à l’encouragement du travail

des seniors, à l’instar de la création d’un CDI senior proposé par le patronat, l’autoentrepreneuriat ou le management de transition qui peut agir comme une « réassurance ». Un dirigeant qui a fait une mission augmente son niveau de confiance en soi professionnelle, au regard de l’exigence de rapidité d’adaptation et d’exécution. S’il est amené à succomber ensuite à nouveau aux sirènes d’un CDI, il l’abordera avec davantage de sérénité étant rasséréné sur sa valeur travail et son aptitude à rebondir. De la même manière, avec l’accélération de l’innovation technologique, une formation et une remise à niveau procurent une plus grande confiance chez les cadres seniors. On le sait, le temps des carrières linéaires où l’on reste dans la même entreprise est révolu.

 

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